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Girls Night Out

Adèle Werner

TW : agression sexuelles, mention de viols 

 

 La nuit peut être vu comme quelque chose de très poétique, une autre dimension, une réalité parallèle. La nuit on ose. On dit avec plus d’assurance, on sort, on boit, on s’amuse. Si la nuit est le temps des sorties, c’est aussi le moment du souci. Pas pour tout le monde cependant. 

Il y a une partie de la population, la majeure partie, qui se fait du souci d’être dehors la nuit. Ce sont les femmes. Nous avons choisi de faire un questionnaire participatif pour traiter le sujet : « être une femme dans l’espace public la nuit. » Nous avons donc lancé ce questionnaire, et avons recueilli 157  réponses. Plus de la moitié (57%) des femmes ayant répondu ont entre 15 et 18 ans. Le document ayant été partagé sur nos réseaux sociaux (Twitter et Facebook), l’âge des gens ayant vu passer le questionnaire n’est pas étonnant, ayant nous même 18 ans. Nous allons d’abord faire le récapitulatif de notre questionnaire pour ensuite les comparer avec des statistiques plus professionnelles, et enfin essayer d’établir une sorte de conclusion à toutes ces données. 

Les questions posées sont basées sur notre appréhension de sortir dans l’espace public la nuit : avez-vous peur ? Changez vous vos habitudes ? Quelles solutions aimeriez vous voir mises en place ? Vous êtes vous déjà faites agresser ? Etc. 

 

Quels résultats ? 

 

Les résultats témoignent d’une peur de masse, seulement 15 personnes ont répondu ne pas avoir peur de sortir la nuit lorsqu’elles sont seules. 40 % n’ont pas peur lorsqu’elles sortaient avec des hommes, et 39 % lorsqu’elles sortaient en groupe mixte. Aucune femme n’a peur la nuit lorsqu’elle est accompagnée d’hommes. 77 % des femmes changent leurs habitudes :itinéraire, se faire raccompagner, rentrer plus tôt, façon de rentrer (prendre un uber plutôt que le métro), façon de s’habiller, prendre un couteau/quelque chose pour se défendre et enfin le maquillage. Nous faisons face à un phénomène qui est que la majorité des femmes ne se sentent pas assez en sécurité la nuit pour être elles-mêmes. 

 

Quelle peur ? 

 

Une vingtaine de personnes ont répondu non, le reste évoque deux principales peurs : les hommes (oui messieurs, juste vous croiser peut suffir à nous angoisser) et la peur de se faire agresser/d’être suivie. La question suivante évoquait l’éducation, et seulement 4 femmes estiment qu’il y a assez de prévention concernant les agressions, et plus généralement, cette peur que beaucoup d’entre nous ressentent. Il y a eu quelques remarques sur le fait qu’on apprend aux filles à perpétrer les efforts pour sortir la nuit : ne pas mettre de jupe « trop courte », ne pas « s’habiller vulgaire », ne pas rentrer trop tard… Mais jamais (ou si peu) on ne dira aux hommes de ne pas juger les femmes sur le tenues, jamais on ne leur dira qu’on ne s’habille pas pour eux, jamais on leur dira de ne pas nous apostropher ou nous parler le soir quand on est seule et qu’on ne se connaît pas, nous sommes dans une société patriarcale et les hommes ne se rendent pas compte de la domination, de la crainte qu’ils peuvent -malgré eux- inspirer. 

 

Quelles solutions ? 

 

 l’éducation revient beaucoup, ainsi que plus de transports en communs ou des tarifs moins chers la nuit, plus de surveillance, des applications d’urgences ainsi qu’un changement dans le comportement des hommes la nuit : comprendre que le simple fait de les croiser quand on est une femme (ou perçue comme une femme) et seule peut nous faire peur et donc agir en prévention : ne pas marcher derrière nous sur le même trottoir, ne pas nous apostropher, ne pas insister si on indique qu’on ne veut pas (c’est valable en journée aussi) etc. Nous avons demandé l’âge lors de la première agression, qu’elle soit physique ou verbale : 3,4 % avait 10 ans ou moins (rappel que dans la plupart des cas, les agressions proviennent de l’entourage), 7,7 % avait entre 11 et 14 ans, 77,8 % avaient entre 15 et 18 ans et 11,1 % avait 18 ans ou plus. On constate que la tranche d’âge ayant le plus répondu au questionnaire est la même ayant connu sa première agression dans cette tranche d’âge. 

 

Point solution : numéro d’urgence. Pourquoi ce n’est pas forcément une bonne idée ? 

 

Un numéro anti-relous avait été proposé  en octobre 2017 pour prévenir ces « relous » de la nuit qui ne nous laisseront pas tranquilles avant qu’on ait donné notre numéro. Cependant, un raid de « militants » anti-féministes (principalement des hommes venus du forum JVC) sur la ligne avait poussé ses créateurices (Clara Gonzales et Elliot Lepers) à couper la ligne. 

Si l’initiative avait déplu à des « militants anti-féministes », du côté des femmes elle avait été estimée comme dangereuse. En effet, comme l’explique une personne sur Twitter,  « le numéro de téléphone anti-relous part d’une bonne intention. Mais maintenant que c’est médiatisé, n’est plus une bonne idée,  cela met en danger. Mettons nous à la place d’un relou qui voit passer le numéro à la télé, sur Twitter, Facebook… Premier réflexe : l’enregistrer dans son répertoire. Et vous allez le donner en soirée à des types bourrés, ou dans la rue à des forceurs potentiellement dérangés ou venères Vous serez potentiellement seule. Et ça va dégénérer. Parce que le second réflexe du Relou c’est d’être relou et tenter de vous faire sonner. Et de vous voir enregistrer son numéro en retour. Donc deux possibilités : - soit il a enregistré ledit numéro et vous êtes cramées. Soit il appelle le dit numéro sur place avec vous et patatra. Parce que le premier réflexe du relou c’est pas le texto, et si son réflexe c’est  le texto, c’est potentiellement plus un timide (même si c’est toujours pénible de se sentir forcée à donner son numéro). En bref, ce numéro c’est juste un coup à vous faire péter les chicots en direct live, ou pire. Et si vous êtes témoin d’une nana qui se fait emmerder pour obtenir d’elle son numéro, intervenez, intimider ça à tendance à mieux marcher. Après un système de numéro ça peut peut-être fonctionner si c’est régional/communal, que le numéro change régulièrement ? Mais pas comme ça. » 

Ayant trouvé cette réflexion pertinente, je me permets de vous la partager. 

 

Quid des statistiques officielles ? 

 

Dans les pays de l’Union européenne 40 à 50 % des femmes subissent des avances sexuelles non désirées ou des agressions sexuelles. Cette situation explique que la majorité des femmes ont peur de marcher seules dans la rue la nuit, c’est un effet miroir : une réalité entraîne en conséquence                                               

  

Source ICI

 

Concernant les adolescentes en France, 6 % ont subi des violences sexuelles à 14 ans, 12 % à 18 ans.  60 % des adolescentes ont subi du harcèlement sexuel dans l’espace public. 

 

Si les agressions et les viols sont effectivement pratiqués la nuit ils se font, contrairement à ce que l’on pourrait penser en premier lieu, dans l’espace privé. Ainsi, l’enquête Virage, réalisée en 2015 par l’INED (institut national d’études démographiques) a passé en revue les violences sexuelles par espace de vie au cours des douze derniers mois. Source ICI

Ces derniers mois, 62 000 femmes ont été victimes d’un viol/et ou d’une tentative de viol. 580 000 femmes ont subi au moins une agression sexuelle. L’enquête montre que 1,6 % des femmes ont subi ces violences par un membre de la famille ou un proche, et 1,4 % des femmes ont subi cela au sein du couple. 

 

Selon une enquête gouvernementale effectuée dans la ville de Paris en 2013-2014, 70 % des viols sont commis la nuit. Néanmoins, c’est dans le 16ème arrondissement (zone huppée) que l’on enregistre le plus grand nombre de ces crimes. 57 % des viols ont été commis dans des lieux d’habitations et 16% dans d’autres lieux privés comme des cabinets médicaux, véhicules etc. Si ces chiffres témoigne d’une réalité parisienne, il est possible de les généraliser, comme vu auparavant. Les agressions sexuelles ont bel et bien lieu la nuit, mais elles se font dans l’intimité, souvent dans un contexte de confiance. 

 

Dans ce cas, pourquoi avoir peur de sortir la nuit dans l’espace public quand on est une femme si les agressions sont faites dans l’espace privé ? 

Parce que depuis l’enfance on nous apprend que l’on est des proies faciles. Que les hommes ont du pouvoir, plus que nous. Cela correspond à la réalité, par exemple, en payant moins les femmes que les hommes pour le même travail, on nous apprend à assimiler que l’on a une valeur moindre. 

 

Alors que faire ? Devons nous nous méfier de chaque homme de notre entourage ? La réponse n’est pas binaire, je dirais qu’il faut garder à l’esprit que l’homme a internalisé le fait qu’il ai du pouvoir. Les hommes eux, doivent s’éduquer sur le consentement. S’éduquer tout court. 

 

 

Habiter l’espace public la nuit quand on est une femme. C’est surtout le reflet d’une société patriarcale, entre domination, inégalités, et agressions. 

 

Pour finir cet article sur une déconstruction des mythes autour du viol, je vous laisse le lien de ce pdf (en anglais) qui déconstruit 12 points. Simple et efficace : LIEN

 

Je vous invite tou.te.s à vous éduquer, à être allié.e.s dans la lutte contre les agressions. On n’en sait jamais assez. 

 

Si vous désirez réagir à mon article, je vous laisse mon adresse e-mail : queenofcernes@gmail.com 

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